Il y a peu, les « bots » se contentaient d’exécuter des tâches programmées au préalable par des humains, à partir de mots clés, mais la compréhension du langage naturel était hors de leurs compétences. Toutefois, l’essor de modèles génératifs — GPT en tête de liste — a radicalement changé la donne : aujourd’hui, les agents IA sont à même de comprendre des « prompts » complexes, de rentrer en interaction avec d’autres systèmes et d’exécuter des tâches avec un moindre degré d’intervention humaine.
Mais là où la révolution s’opère réellement est très certainement dans leur capacité à travailler ensemble. Ce sont dorénavant de véritables écosystèmes d’agents spécialisés (image, vidéo, code, RH, CRM, entre autres) qui peuvent être déployés en entreprise. L’heure n’est donc plus aux agents IA uniques.
Une véritable transformation technologique
Aujourd’hui, les entreprises ont bien intégré l’utilisation d’agents intelligents dans leurs outils. On pense notamment à Microsoft Copilot ou autres chatbots utilisés dans les CRM. Ces assistants sont indéniablement efficaces, mais ils restent isolés et se contentent d’exécuter des tâches simples et ponctuelles, en vue de répondre à des requêtes spécifiques.
Les nouveaux agents IA vont désormais au-delà de ces limites. Ils peuvent travailler ensemble pour établir un véritable écosystème automatisé. Ce dernier peut s’appliquer à des cas d’usage concrets, par exemple les demandes des salariés sur des sujets RH, les congés ou la paie. Un agent pourra, par l’intermédiaire d’un chatbot, y répondre tout en les traitant via une boîte mail, comme suit.
Tout d’abord, un premier agent détecte la réception d’un nouveau ticket et orchestre les prochaines tâches, avant qu’un deuxième agent spécialisé analyse les emails réceptionnés, identifie le sujet et l’auteur de la demande. Selon la nature de la demande, il transmet le traitement à un troisième agent, qui consultera la solution RH (Workday ou SAP) et s’occupera de la demande. Enfin, un dernier agent envoie un mail de confirmation au salarié et clôture le ticket. L’ensemble de ce procédé est traité sans aucune intervention humaine et en toute fiabilité.
Une avancée majeure pour les entreprises
Un tel progrès dans l’automatisation s’explique par l’essor de trois technologies. Premièrement, celui de la genAI et du NLP (natural language processing, traitement automatique du langage naturel), qui ont grandement fait gagner en précision l’interprétation de requêtes complexes, sans programmation avancée. Deuxièmement, celui des agents spécialisés (alors qu’un seul agent traitait l’ensemble des tâches, désormais, chacun d’entre eux se voit assigner un rôle et collabore avec les autres) qui permet une orchestration sans faille. Troisièmement, celui des outils de no-code et du cloud, qui rend cette technologie accessible à tous : nul besoin d’expertise technique poussée pour pouvoir configurer les agents.
Cette grande avancée s’accompagne de bénéfices concrets pour les entreprises. À commencer par une automatisation à grande échelle, peu importe la complexité du processus. Par ailleurs, étant donné que les tâches répétitives sont réduites au maximum, les équipes peuvent s’adonner à des opérations à plus forte valeur ajoutée. L’expérience utilisateur est également améliorée, grâce à un support continu et des réponses immédiates.
Autre atout majeur, et pas des moindres : les agents AI s’avèrent particulièrement rentables. En effet, le traitement d’une opération revient à entre 20 centimes et 2 euros, ce qui est bien inférieur au coût d’une intervention humaine. À titre d’exemple, un centre de support client est à même d’automatiser 90 % des demandes avec cette technologie. À la clé, une réduction considérable des dépenses et une bien plus grande réactivité du service.
Une certaine préparation qui reste toutefois primordiale
Certes, les avantages offerts par les agents IA sont indéniables. Mais il est indispensable de déployer cette technologie avec un encadrement très strict. Le premier point de vigilance réside dans son intégration aux systèmes existants : pour qu’ils soient pleinement opérationnels, il faut être à même de connecter les agents IA à la grande variété d’outils métiers utilisés (CRM, ERP, gestion des tickets, RH/paie, plateforme collaborative). Une automatisation efficace et l’élimination des silos passe par une orchestration optimale des flux de données.
La sécurité et la gouvernance restent cruciales. L’automatisation d’opérations critiques va de pair avec une solide protection, pour éviter les erreurs et se conformer aux réglementations comme le RGPD ou les normes sectorielles. Si le processus des agents IA est totalement automatisé, il demeure indispensable de le superviser par un humain pour s’assurer de son bon fonctionnement et pour se protéger de potentielles dérives.
Troisième et dernier enjeu : la bonne adoption des agents IA par les différentes équipes. Pour libérer pleinement le potentiel de cette avancée, il faut veiller à ce que tous les collaborateurs acceptent son utilisation. Pour ce faire, leur formation et leur implication dès le départ restent indispensables. Ils pourront ainsi prendre en main cette technologie avec fluidité, mais surtout la considérer comme un outil à même d’optimiser leurs opérations, et non comme une menace pour leur emploi.
L’intelligence artificielle a aujourd’hui dépassé les barrières du simple assistant, elle devient un véritable levier stratégique pouvant redéfinir la gestion des opérations. S’il n’y a plus l’ombre d’un doute sur la réponse à la question « L’IA va-t-elle s’imposer ? », il faut désormais se poser la suivante : « Comment structurer son adoption en entreprise pour en tirer pleinement parti ? ». Certes, les agents IA ont un énorme potentiel, mais les déployer à l’aveugle serait lourd de conséquences. C’est pourquoi l’élaboration d’une stratégie structurée et sécurisée apparaît comme une étape indispensable, au cours de laquelle l’humain garde une place prédominante. En gardant cela en tête, les entreprises auront toutes les cartes en main pour prendre durablement de l’avance sur la concurrence.
Jean-Christophe HORNY
Technology Specialist chez Insight.