Anders Billesø Beck
Vice-président chargé de la stratégie et de l’innovation chez Universal Robots
Anders Billesø Beck dirige le développement des technologies de robotique collaborative (ou cobotique) qui permettent aux entreprises mondiales de rester agiles, productives et innovantes. Titulaire d’un doctorat en robotique de l’Université Technique du Danemark (DTU), il a occupé des postes de direction au sein de l’Institut avant de rejoindre Universal Robots en 2018.
Anders combine sa formation scientifique et ses contributions au secteur mondial de l’automatisation collaborative dans le but de changer la façon dont le monde travaille.
Pourtant, ces technologies ne sont pas nouvelles. Nous les connaissons déjà depuis des décennies, mais la récente révolution est principalement due aux progrès de la puissance de calcul, qui nous permettent de traiter les énormes quantités de données nécessaires pour prendre en charge les tâches complexes que nous commençons à confier à l’IA.
Les entreprises derrière cette révolution, comme Nvidia, connaissent une croissance extraordinaire.
Mais à la mi -2024, quels progrès avons-nous réalisés dans la révolution de l’IA physique ?
Sur une échelle de 1 à 5…
Pour être honnêtes, nous n’y sommes pas encore tout à fait. J’aime comparer la robotique au développement des voitures autonomes. L’industrie automobile a défini cinq étapes pour passer de la conduite manuelle à la conduite entièrement autonome. Actuellement, nous ne sommes pas encore au niveau 5, comme l’ont montré de récentes expériences aux États-Unis. Cependant, il existe de nombreuses technologies de niveaux 2, 3 et 4 en développement qui peuvent avoir un impact majeur. Par exemple, le régulateur de vitesse adaptatif dans les voitures a transformé un processus très manuel en un processus semi-automatisé, rendant la conduite plus fluide, plus facile et plus sûre.
Il en va de même pour la robotique. L’IA aboutira certainement un jour à des robots humanoïdes capables de réfléchir et de résoudre des problèmes par eux-mêmes sans programmation préalable — ce serait le niveau 5. Mais, comme pour les voitures autonomes, nous verrons — et nous voyons déjà — de nombreuses percées aux niveaux 2, 3 et 4 qui apportent une véritable valeur ajoutée aux entreprises.
L’une des avancées notables dans le domaine de l’IA physique peut être observée dans la logistique. Prenons par exemple le partenariat que nous avons établi avec Siemens et Zivid. Nous avons développé une solution où un cobot effectue la préparation de commandes de manière autonome. Utilisant le logiciel SIMATIC Robot Pick AI de Siemens et la technologie de vision de Zivid, cette solution améliore la vitesse et la précision d’exécution des commandes dans les entrepôts. Tout en atténuant la pénurie de main-d’œuvre pour les tâches manuelles, elle aidera ainsi les centres logistiques à répondre à une demande mondiale croissante.
Pour parvenir à un robot humanoïde de niveau 5, il faudra disposer, entre autres, d’une technologie de vision et d’un logiciel exceptionnel, ce qui n’est pas encore le cas. Cependant, les innovations technologiques intermédiaires apportent déjà une grande valeur ajoutée.
Trois impacts de l’IA générative
Si vous réunissez une poignée d’experts en robotique pour qu’ils s’accordent sur notre position actuelle sur l’échelle mentionnée précédemment, la discussion pourrait durer très longtemps. Il est toutefois évident que, malgré les grandes avancées réalisées en 2023 et 2024, nous avons encore beaucoup de chemin à parcourir pour exploiter pleinement la capacité de l’IA physique à casser les lignes.
Par anticipation, permettez-moi de souligner trois impacts majeurs que l’IA physique aura sur la robotique.
Réduction considérable du besoin d’expertise
Bien entendu, nous aurons encore besoin d’ingénieurs en robotique, d’intégrateurs et d’autres experts qualifiés à l’avenir, et ils seront nombreux. Mais le potentiel de l’automatisation des robots est si important qu’il ne peut y avoir un expert dans chaque usine (en tant qu’industrie, les cobots n’ont atteint qu’environ deux pour cent du marché potentiel actuel). De nombreuses tâches robotiques nécessitent encore aujourd’hui l’intervention d’un expert. Grâce à l’IA, nous serons bientôt en mesure d’éliminer certains des obstacles actuels, ce qui accélérera considérablement l’introduction des robots dans de nombreux domaines.
Normalisation des solutions
L’IA générative peut aider à normaliser les solutions dans le secteur de l’automatisation. Les problèmes rencontrés sont souvent similaires entre les différentes entreprises, et l’IA générative permet de standardiser les problèmes et les solutions, rendant ainsi les comportements robotiques plus réutilisables. Cela élimine la nécessité de réinventer la roue à chaque nouveau déploiement d’un robot, accélérant ainsi l’intégration et le retour sur investissement.
Amélioration de la navigation des robots dans des environnements imprévisibles
La technologie de vision avec retour d’information en temps réel à partir de caméras 3D permet non seulement une navigation autonome, mais aussi la détection d’obstacles. On peut par conséquent déployer des robots en dehors de l’environnement très structuré des usines, par exemple dans le secteur de la construction où les robots doivent gérer les variations des projets tout en travaillant aux côtés des ouvriers.
Chez Universal Robots, nous avons déjà de nombreux partenaires dans notre écosystème qui réalisent de grandes avancées avec des applications reposant sur l’IA — dans la construction et au-delà. Et comme tant d’autres tendances en matière d’automatisation que nous connaîtrons dans les années à venir à travers les applications et les industries, l’IA sera au cœur des progrès futurs.